25 mai 2018 – 20h30
Une interrogation sur la poétique des symboles et l’expérience du sacré peut nous faire cheminer aussi bien dans le champ de l’art, du langage que dans celui de l’histoire de la pensée. Une poétique des symboles sollicite l’imaginaire de l’homme plutôt que sa faculté de conceptualisation tout comme une expérience du sacré échappe à une argumentation démonstrative. Pour tenter de penser la question de l’articulation de la poétique des symboles à l’expérience du sacré, nous confronterons une double approche, d’une part hellénique, d’autre part pascalienne. Chez Pindare, les symboles inspirés de la nature aident à décrypter l’humain et le divin, et le poète est celui qui chante le sacré, un sacré sans lequel s’effondrerait la cité. Dans l’œuvre de Hölderlin, apôtre de la Grèce, le sacré apparaît omniprésent et les poètes sont « serviteurs de l’esprit », un esprit symbolisé par l’Ether. La nature prend les traits de l’infini. Heidegger, lisant et interprétant Hölderlin, voit dans le sacré l’« être de la Nature » et la tâche du poète comme étant de penser ce sacré. S’il invite à revenir à la phusis grecque comme dévoilement de la vérité, sa pensée du sacré laisse dans l’ombre le symbolique.
Les Pensées de Pascal sont nourries de symboles, puisées le plus souvent dans la Bible où ils sont omniprésents (animaux, chiffres, éléments) et irriguent un langage de l’évocation, non de la démonstration. La poétique des symboles dans les fragments apologétiques se fonde sur une expérience du sacré. Chez Pascal, tout est affaire d’expérience, dans la science d’abord, dans l’existence ensuite. Son expérience du sacré ne met pas en jeu la nature, à la différence de l’approche hellénique relue par la poésie et la philosophie allemandes, mais le surnaturel. Toutefois une harmonie, ou à tout le moins une transition, n’est-elle pas possible entre les deux ?
Pour terminer, quittant l’analyse seulement historique pour une relecture synthétique, nous nous interrogerons sur l’art sacré et l’utilisation qui peut y être faite des symboles, sur la nature du langage quand il n’est plus informatif ou démonstratif mais intuitif et poétique, sur l’enjeu de l’expérience du sacré pour la condition humaine et la vie à l’intérieur de la cité.
Bernard Grasset