« Il faut respecter la nature ! » : cette obligation absolue semble aller de soi aujourd’hui, à notre époque qui ne supporte plus, pourtant, aucune injonction au devoir, surtout sous forme d’ « impératif catégorique » ! N’est-il pas devenu évident, en effet, que la volonté de puissance et de jouissance des hommes, qui s’augmente en un transhumanisme ou post-humanisme débridé (dé-mesuré), met en danger jusqu’à l’existence même de la nature et donc celle de l’humanité elle-même ?
Mais, pour faire face à cette menace ultime, est-il aussi évident qu’il faille (comme on le dit et l’entend dire maintenant partout, donc) « respecter la nature », c’est-à-dire lui reconnaître une dignité égale voire supérieure à celle de l’homme, comme dans l’écologisme radical, au point de faire de la nature la législatrice de l’histoire des hommes, qui devraient alors une obéissance absolue, sans condition et sans délai, à l’ordre naturel (des choses), entendu à la fois comme ordonnancement et commandement ?
En notre temps de dépérissement et même de mort des utopies socio-politiques, l’écologisme naturaliste et le post-humanisme machiniste ne prétendent-ils pas (de façon d’ailleurs plus concourante que réellement concurrente) au statut d’utopies substitutives radicales et, si oui, qu’en découle-t-il pour le projet humaniste des Lumières d’éclairement et d’émancipation des hommes?
Joël Gaubert, le 3 septembre 2019